Du site le Journal de Montréal - Le blogue de Mathieu Bock-Côté :L’idéologie d’Oprah Winfrey !
¨Oprah Winfrey était au centre Bell. Je n’ai pas assisté à son spectacle, ou si on préfère, à son discours. Mais à lire ce qu’on en a rapporté, une chose me frappe : c’était le passage de la grande prêtresse d’un culte médiatico-planétaire. Ou plutôt, d’une «preacher» à l’américaine. D’ailleurs, il suffisait d’écouter une radio ou d’ouvrir une télévision pour entendre la recension extatique de la venue de la grande dame de la télévision américaine à Montréal. Oprah Winfrey était ici pour livrer sa bonne nouvelle.
La bonne nouvelle d’Oprah Winfrey, c’est le fameux : si on veut, on peut, pour peu qu’on accompagne le tout de «pensée positive». Ceux qui rapportaient son propos en arrivaient tous à la même conclusion: il ne dépend que de vous de réussir. Un homme peut révolutionner son existence s’il le veut vraiment. De ce point de vue, Oprah Winfrey est une ambassadrice de l’American dream. Elle lui donne une formulation actuelle en plus de l’incarner de manière décomplexée.
Il y a évidemment quelque chose d’exceptionnel dans son parcours. Elle représente probablement l’expression la plus visible du rêve américain tel qu’il s’est renouvelé avec la mondialisation. La petite fille sortie du Mississipi, promise à rien, et parvenant à tout obtenir et cela, en exposant son authenticité à la télévision. Elle a voulu sortir des marges de la société. Elle y est parvenue. Il n’est interdit à personne de l’admirer comme on admire les grandes réussites, quelles qu’elles soient.
Le problème, c’est lorsqu’on la donne en modèle, comme si son parcours était finalement porteur d’une promesse pour tous. Car cette idée que chacun peut devenir exceptionnel s’il le veut vraiment occulte une chose fondamentale : sauf pour quelques personnalités d’exception, une vie réussie ne dépend pas seulement de la volonté. Évidemment, elle joue un rôle important. Mais cette volonté prend forme dans une société, qui peut tirer ceux qui y habitent vers le haut ou vers le bas. Le problème d’un tel discours, c’est que c’est un immense mensonge.
J’en reviens au prêche d’Oprah Winfrey. Ce qui me choque, c’est l’individualisme dépolitisant qu’elle relaie. La promesse d’un destin exceptionnel, ici, vient ici laisser croire à ceux qui se battent qu’ils sortiront peut-être vainqueurs de la lutte. Un seul succès ne saurait racheter vraiment le déclassement social de millions de personnes. C’est l’immense fardeau qu’on fait porter à chaque homme parce qu’on a renoncé à réparer les fondations de notre société, et cela, parce que nous refusons d’admettre que l’individualisme postmoderne a ses limites.
Évidemment, il y aura toujours des individus d’exception. Je n’en conteste ni la valeur, ni la nécessité et je n’ignore pas qu’ils sont indispensables aux changements sociaux comme aux grands accomplissements. Mais le propre de l’exception est de ne pas se prendre pour la norme. C’est pourtant le cadre collectif de nos sociétés qu’il faut rebâtir pour que l’individu puisse s’épanouir. Grand bien fasse aux vedettes de la télévision et aux stars de la mondialisation, aux héritiers et aux parvenus qui baignent dans les millions. C’est plutôt le sort de ceux qui désirent seulement vivre dignement sans se prendre pour des dieux qui m’importe. C’est pour eux que la réflexion sur la cité m’importe tant¨(Lire au complet)
Pégé
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